Rosmery

Situation covid19, témoignage de Rosmery

Rosmery

Voici le témoignage de Rosmery, bénévole à Huchuy Yachaq et soeur de Fiorella (élève au jardin d’enfants Las Hormiguitas du centre social Huchuy Yachaq). 

Rosmery est l’une des fiertés de Marlene (fondatrice du centre social). Petite (dès ses 5 ans), elle participait régulièrement aux activités de la biblioteca (lecture, théâtre, échasses, …). Après un parcours scolaire exemplaire, elle a intégré cette année une université de Lima (du fait de la covid19, elle suit les cours à distance depuis Cusco et se rendra à Lima à partir de mars 2021). Vivant toujours dans le quartier d’Huchuy Yachaq, durant le confinement elle a prêté main forte à l’équipe enseignante. Ses parents ne sachant à peine lire et écrire, c’est donc Rosmery qui assiste sa petite soeur Fiorella. 

« Le virus faisait les gros titres du monde entier depuis des mois et ma petite sœur Fiorella venait à peine de commencer sa deuxième semaine en dernière année de maternelle au Jardin Las Hormiguitas, quand le gouvernement du Pérou a déclaré l’état d’urgence et la quarantaine. Dès le lendemain elle ne pourrait plus aller en classe. Depuis, cinq mois ont passé et nous faisons face à ce défi d’éducation à distance comme nous le pouvons. 

Je crois pour commencer qu’il est nécessaire de reconnaître le travail acharné que réalisent les maîtresses, en effet, contrairement aux autres institutions, elles préparent le matériel et ensuite elles l’envoient au domicile des enfants. L’initiative a été prise dès la fin des classes en présentiel. Tous les 15 jours, elles nous envoient des cahiers, des livrets, des extraits de livres avec le matériel nécessaire pour travailler. 

Comme je l’ai indiqué auparavant, ma sœur n’avait côtoyé sa maîtresse qu’une semaine et quelques jours mais ce temps a été suffisant pour qu’elle s’attache à elle. Depuis, même quand elle reçoit un appel de sa maîtresse elle est tout émue. Cela s’est produit aussi avec les visites à domicile. Je pense que ce type d’actions fait que les enfants se sentent uniques et cela les rend plus sûrs parce que, malgré la distance avec les professeurs, ils dépendent d´eux. Le travail constant de l’équipe soulage la tension que la situation produit sur les enfants et renforce le lien qui existe entre l’élève et son maître.

De notre côté il est trompeur de dire que tout a été rose. Le Jardin est le premier groupe social dont les enfants font partie en dehors de la famille. C’est ici qu’ils commencent à construire leur personnalité et l’interaction avec leurs pairs. Ceci est très important pour leur développement. Je me souviens que Fiorella rentrait du jardin d’enfant très contente, riche de toutes les expériences avec ses camarades, qu’elle racontait avec son euphorie d’enfant. Elle réalise ses activités quotidiennes en deux heures, après elle joue seule, parfois avec une voisine, et quand elle s’ennuie, elle demande à regarder la télévision et il est difficile de lui refuser car il n’y a rien de plus à faire. 

fiorella Huchuy YachaqFiorella

Je remarque que ses camarades lui manquent et quand elle se rappelle quelque chose sur le Jardin tout de suite elle nous le raconte. Tout cela est très difficile pour les enfants. On a cherché une solution pour qu’ils maintiennent le contact entre eux et bien entendu avec  la maîtresse grâce à des appels en Visio mais cela n’a pas pu avoir lieu à cause de l’obstacle que représente  l’éducation à distance et l’inaccessibilité à Internet. 

Le Jardin Las Hormiguitas a ouvert ses portes il y a déjà 11 ans alors que cette zone était considérée comme l’une des plus vulnérables de la ville de Cusco. Le temps a passé et bien que mon quartier semble avoir progressé, les difficultés économiques de certaines familles sont notoires et c’est exactement cela qui a empêché l’interaction virtuelle entre les camarades de classe. Le plus accessible pour la plupart des familles, ce qui est aussi notre cas c’est WhatsApp.

En ce qui concerne la charge de travail, l’idée de l’éducation à distance est que la famille complète les leçons que la maîtresse envoie dans des vidéos et prenne le temps de guider leurs enfants dans le déroulement des activités quotidiennes, mais il s’avère que c’était une tâche difficile à cause de plusieurs facteurs. Mes parents, comme sans doute la plupart des parents,  vivent au jour le jour.  Ce n’est pas dû à la situation actuelle, mais cela l’aggrave.  Il est vrai que le confinement oblige beaucoup de familles à rester à la maison ce qui devrait être un changement bénéfique pour l’éducation des enfants, mais malheureusement, ce n’est pas le cas à cause du stress et de l’impuissance ou, dans le cas de certaines familles, priorité est donnée à des enfants plus grands.  De même , bien que mes parents aient le désir d’accompagner ma petite sœur dans son éducation, leur peu de connaissances de la technologie, leur analphabétisme les en empêchent. Alors c’est pour cela que c’est à moi de m’en charger. 

En conclusion, le secteur de l’éducation a été l’un des plus touchés par la pandémie. Pour pallier cette situation il est nécessaire que tous les enseignants, comme les parents ou ceux qui s’occupent des enfants, travaillent main dans la main. Je ne sais pas si les camarades de Fiorella ont fait des progrès, cependant, le travail réalisé par l’équipe pédagogique du jardin est concret et louable. 

Pour terminer je voudrais remercier très chaleureusement l’association Huchuy Yachaq qui a permis de diminuer les conséquences de cette épreuve grâce aux dons d’aliments, de kits de nettoyage et d’élément qui contribuent grandement à l’éducation des enfants. »


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